Plusieurs difficultés et freins au développement significatif de la finance mixte dans les pays les moins avancés (PMA) ont été soulignés par les panélistes et les participants réunis par l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF).
C’était lors d’un événement parallèle sur « la finance mixte. Quels enjeux pour les pays francophones ? » organisé par l’OIF dans le cadre de la 5e Conférence des Nations unies sur les pays les moins avancés (PMA) tenue à Doha du 5 au 9 mars 2023.
Lamine Lo, Directeur des financements et des partenariats public-privé au ministère de l’Économie, du Plan et de la Coopération du Sénégal, cité par un communique de l’OIF, a souligné la question centrale de la perception du risque pays.
« Guidée par les agences de notation, cette perception du risque est bien souvent trop élevée par rapport au risque réel du marché et entraine des coûts supplémentaires d’accès aux ressources privées, difficilement compensables par les ressources concessionnelles publiques », note M Lo.
Selon lui, une meilleure évaluation du risque pourrait même pour certains projets permettre de rendre inutile le recours aux outils de réduction des risques offerts par la finance mixte.
L’OIF souligne à ce propos, qu’il est également nécessaire de prendre davantage en compte l’impact des projets sur le développement afin qu’elle ne se résume pas à une approche purement structurelle permettant de maintenir le niveau de profitabilité des projets pour les investisseurs privés.
« Cela est d’autant plus important que la finance mixte mobilise des fonds de l’aide publique au développement dont les PMA ont le plus grand besoin pour mettre en œuvre leurs stratégies de développement et réduire leurs vulnérabilités, et qui par conséquent doit être utilisée de la façon la plus optimale possible », selon la source.
Dans cet esprit, Mme Nadjati Soidiki, Directrice générale de l’Agence nationale de promotion des investissements des Comores, a encouragé à adopter différentes approches de financement mixte pour tenir compte des vulnérabilités spécifiques des pays.
Mieux tenir compte de l’impact des projets soulève la question, également clé, de l’évaluation du succès de la finance mixte, qui devrait reposer sur la mesure de l’impact des projets sur le développement plutôt que sur la mesure du volume des financements privés mobilisés.
Cela implique par ailleurs une meilleure préparation des projets et le renforcement des acteurs locaux dans cette perspective, des procédures d’accès plus adaptées au rythme de déploiement des projets, ainsi que la mise à disposition de données plus détaillées sur les projets, également demandée par les investisseurs privés.
Cela rejoint une des propositions de l’étude qui suggère de fournir plus de données permettant de juger du caractère éligible des projets à la finance mixte.
Cette discussion se poursuivra dans le cadre de la conférence internationale sur le « Nouveau pacte financier » avec le Sud, qui sera organisée par la France les 22 et 23 juin 2023 à Paris. Tel qu’indiqué par M. Papa Amadou Sarr, la mobilisation des financements privés sera un des axes de travail de cette conférence qui vise l’identification d’actions concrètes pour appuyer l’accès des pays vulnérables aux financements nécessaires pour faire face aux conséquences des crises récentes et futures.
La finance mixte est définie comme l’utilisation combinée de financements concessionnels, c’est-à-dire un prêt dont le taux d’intérêt est inférieur aux taux du marché, classiquement fournis par des bailleurs de fonds public au service du développement, et de financements provenant de sources privées (philanthropique ou commerciale) selon un dispositif de partage des risques améliorant le profil risque-rendement des investissements à un niveau acceptable pour des investisseurs privés.
La concertation a réuni des représentants des secteurs publics et privés et de la société civile qui ont échangé sur la mise en œuvre dans les PMA de cette approche, le rôle des acteurs locaux et les conditions de son succès dans ces pays, sur la base d’une étude réalisée pour l’OIF.
Selon cette étude, les PMA francophones reçoivent relativement plus de financements mixtes par rapport à la tendance mondiale. Parmi les 10 pays francophones qui reçoivent le plus de financements mixtes, la moitié sont des PMA alors que 3 seulement figurent dans la liste des 10 premiers au niveau mondial. Les montants restent cependant faibles.